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Proche-Orient : plus d’un an après la guerre, le conflit s’étend et soulève de nouveaux enjeux

Proche-Orient : plus d’un an après la guerre, le conflit s’étend et soulève de nouveaux enjeux

Proche-Orient : plus d’un an après la guerre, le conflit s’étend et soulève de nouveaux enjeux

Depuis un an et deux jours, le Proche-Orient connaît un conflit de très haute intensité. Au début, il se limitait surtout à la bande de Gaza, même si, temporairement, l’Iran pouvait être impliqué. Cependant, les 17 et 18 septembre 2024, le Hezbollah a été visé par des explosions de bipeurs et de talkies-walkies, très certainement organisées par Israël. Le 30 septembre, après avoir bombardé la zone, Israël a mené des opérations terrestres au Liban. Le 1er octobre, l’Iran a lancé entre 180 et 200 missiles sur l’Etat hébreu. Ces dernières étapes montrent une extension du conflit depuis la mi-septembre. Quels sont les enjeux soulevés par cette évolution ?

Au Liban : la volonté d’Israël d’éliminer le Hezbollah mais un pays entièrement touché

Le Liban est le pays où est implanté le Hezbollah, organisation terroriste pro-iranienne et alliée du Hamas. En octobre 2023, le Hezbollah avait lancé des roquettes sur Israël, qui avait riposté. Jusqu’en septembre, quelques frappes ont eu lieu, de part et d’autre, sans que la situation ne connaisse une grande escalade. Ainsi, jusqu’en septembre 2024, le conflit entre Israël et le Hezbollah restait de faible intensité.

A partir du 4 septembre, les frappes se sont intensifiées. Cependant, c’est réellement le 17 septembre que Benyamin Netanyahou, le premier ministre israélien, a annoncé vouloir « affaiblir un maximum les capacités militaires du Hezbollah ». C’est à cette date qu’ont explosé des bipeurs, des systèmes de communication utilisés par le Hezbollah. Le lendemain, ce sont des talkies-walkies de l’organisation qui ont explosé. Ces attaques ont très sûrement été organisées par Israël, même si l’état hébreu ne les a pas revendiquées. Elles ont tué plus de 40 personnes, et en ont blessé plus de 3500. C’est le signal qui a donné le coup d’envoi à des frappes israéliennes sur le territoire libanais, très intenses à partir du 23 septembre. Ces frappes ont touché le sud et l’est du Liban, et devaient viser les positions du Hezbollah. En réalité, beaucoup de zones d’habitations ont aussi été touchées. Il y aurait en effet eu, en une semaine, plus de 2000 morts, 9500 blessés, et 1,2 millions de personnes ayant dû quitter leur foyer, souvent pour la capitale, Beyrouth. Au niveau international, ces frappes ont suscité une grande émotion, et l’ONU s’est réunie en urgence, et a demandé, à la grande majorité, un cessez-le-feu provisoire de 21 jours. Le 29 septembre, le discours de Benyamin Netanyahu n’allait clairement pas dans ce sens.

Le 27 septembre, Israël a tué Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, après des frappes menées sur le quartier général de l’organisation. Cette élimination est un véritable tournant. Tout d’abord, elle touche le Hezbollah, qui est non seulement une organisation militaire, mais aussi une force politique. En effet, l’organisation est représentée dans les institutions libanaises, avec 13 députés sur les 128 que compte la chambre des députés, et avec des ministres. C’est donc un groupe majeur dans les équilibres politiques libanais qui est durement touché. Par ailleurs, le Hezbollah est aussi un allié du Hamas et de l’Iran, et l’assassinat de son chef est un coup porté à l’ensemble de ses alliés. La portée de la mort d’Hassan Nasrallah est donc très importante. Un autre objectif recherché par Benyamin Netanyahu est politique. En effet, depuis le début du conflit, sa popularité baisse en Israël, notamment à cause des opérations militaires, perçues comme disproportionnées et qui ne rassurent pas la population. Alors qu’en octobre 2023 le Premier Ministre bénéficiait d’un soutien de 16,9% de la population israélienne, ce soutien a diminué à 15% en janvier. En bref, Benyamin Netanyahu ne reste en place que grâce à la guerre. Un sondage publié vendredi 27 septembre dans le quotidien israélien Maariv, avant même la mort d’Hassan Nasrallah, a estimé la cote de popularité du Premier Ministre israélien à 20,8%. Ainsi, alors que Benyamin Netanyahu voit sa popularité chuter depuis le début de la guerre, frapper le Hezbollah, et tuer Hassan Nasrallah, lui permet de s’attirer davantage de soutien de la part des Israéliens.

Ainsi, au Liban, le Hezbollah constitue une force politique et militaire majeure. Israël a donc fixé comme objectif d’éliminer cette organisation, mais les opérations menées n’épargnent pas les civils, et semblent de plus en plus concerner la capitale, Beyrouth. De multiples enjeux, internes, locaux, et internationaux, s’entremêlent dans ce contexte.

En Iran : une réaction à la mort d’Hassan Nasrallah et la possibilité d’un conflit durable

L’Iran est un pays dirigé depuis 1979 par les Gardiens de la Révolution, qui sont à la tête d’un régime islamique. Ce pays est un allié du Hamas et du Hezbollah, et un adversaire historique d’Israël et des Etats-Unis.

Depuis le début de la guerre, quelques frappes avaient eu lieu, entre l’Iran et Israël, sans jamais provoquer de conflit majeur. En avril 2024, Israël avait par exemple bombardé l’ambassade iranienne à Damas, en Syrie, et l’Iran avait répliqué en envoyant des drones et des missiles sur Israël. La situation n’avait pas dégénéré en conflit de haute intensité pour autant. Mais, le 27 septembre, après la mort d’Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah, l’Iran a décidé de soutenir l’organisation, à travers des déclarations rendant hommage à leur allié, puis par le biais d’opérations militaires. C’est ainsi que le 30 septembre, l’Iran a bombardé Israël à l’aide d’environ 200 missiles, dont 80% auraient été interceptés. L’attaque a fait un mort et deux blessés, et Israël a exprimé le souhait de répondre.

Une réponse israélienne pourrait avoir des conséquences importantes. En effet, cette riposte pourrait faire entrer l’Iran dans le conflit, et potentiellement certains de ses alliés. Les enjeux sont multiples. Comme on l’a vu avec le Hezbollah, un des buts d’une attaque sur l’Iran serait politique, et permettrait à Benyamin Netanyahu de gagner en popularité dans son pays. Par ailleurs, Israël pourrait mettre à mal la force militaire iranienne en ciblant des sites militaires et industriels. L’Iran possède une armée assez importante, plus de 700 000 soldats, et peut fabriquer des armements variés en grande quantité, notamment des drones et des missiles. Selon le classement Global Firepower, l’Iran était, en 2022, la 14ème puissance militaire mondiale. Enfin, un autre enjeu est le développement du nucléaire iranien. En effet, l’Iran procède à des recherches nucléaires depuis les années 1950. Après la révolution de 1979, le pays a continué ses recherches, aidé par la Russie. On sait qu’il existe, en Iran des infrastructures industrielles et de recherche dédiées au nucléaire, ainsi qu’une centrale nucléaire, ouverte en 2011. Israël s’inquiète donc de la possibilité du développement d’armes nucléaires en Iran. Dans le cadre d’un conflit, ces sites industriels et de recherche pourraient être visés pour ralentir l’avancement du programme nucléaire iranien. Ainsi, de multiples enjeux sont à l’œuvre sur le front iranien, qu’ils soient politiques, technologiques ou militaires. La possibilité d’un conflit durable est dès lors envisageable, et l’implication d’autres puissances aussi, mais très sûrement de manière indirecte, comme c’est déjà le cas actuellement, avec des livraisons d’armes.

Les autres fronts : la bande de Gaza et le Yémen

Encore aujourd’hui, la bande de Gaza reste une zone de combats, bien qu’ils soient moins intenses compte tenu de l’ampleur des opérations, qui ont fortement réduit les capacités du Hamas. Dimanche 6 octobre, Israël a bombardé une zone au nord de la bande de Gaza, visant des « dizaines de cibles militaires ». Selon Mahmoud Bassal, le porte-parole de la défense civile de la bande de Gaza, l’attaque a fait 17 morts. Le même jour, Israël a frappé « l’école Ibn Rushd et la mosquée des martyrs d’Al-Aqsa », visant officiellement des « terroristes du Hamas qui opéraient un centre de commande ». L’attaque a fait 26 morts. Le front gazaoui reste ouvert et très intense, depuis le début de la guerre, 41 870 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza selon le ministère de la santé de la bande de Gaza. L’ONU a d’ailleurs jugé fiables ces chiffres.

Enfin, le Yémen, en partie contrôlé par les Houthis, des alliés de l’Iran, du Hezbollah et du Hamas, s’est impliqué dans le conflit, et a ouvert un nouveau front. En effet, le samedi 26 septembre, les Houthis ont revendiqué un tir de missile vers l’aéroport de Tel-Aviv, deuxième plus grande ville israélienne. En représailles, Israël a bombardé l’ouest du Yémen 3 jours plus tard. Il est à noter que l’état hébreu avait déjà bombardé ce pays en juillet, et que des pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni y mènent aussi des opérations militaires. Israël n’aura donc pas d’opposition de la part des pays occidentaux pour ses attaques menées contre les Houthis. Il est aussi très probable qu’il n’y ait pas de guerre de haute intensité entre Israël et cette organisation. Ainsi, la guerre reste d’actualité dans la bande de Gaza, même si elle est moins médiatisée, et un nouveau front à été ouvert, au Yémen, mais ne sera sans doute pas suivi d’opérations de grande ampleur.